Des accords qui sonnent faux.

L’accord politique partiel qui prévoit la division de l’arrondissement de Bruxelles n’a qu’une seule qualité, celle de porter le dessin d’un accord possible comme une sorte de paravent qui cache le désordre des positions respectives.

Mais nos politiciens en sont arrivés au point que le simple fait d’un semblant d’accord même partiel, même bancal, est, en soi, une victoire qualifiée sans rire d’historique par les politologues stipendiaires de notre particratie.

Il est donc politiquement inconvenant de ne pas s’en réjouir à grands cris, et toute réflexion, toute intervention qui pourrait faire tourner la mayonnaise que les chefs de partis espèrent voir prendre, est condamnée a priori et sans appel par le tribunal de la bienséance politico-médiatique.

Or chacun peut voir et entendre que cet accord n’en est pas un. Il suffit pour cela d’écouter les lectures qu’en font les signataires et de remarquer qu’entre les lignes du peu qui est écrit, figurent beaucoup de blancs que remplissent de façon diamétralement opposée les négociateurs et autres commentateurs adoubés. En réalité, le seul accord véritable existant est celui de ne plus étaler pour un temps les divergences dont plus d’un an d’atermoiements funestes a largement prouvé l’irréductibilité.

L’oligarchie particratique se trouve en réalité face à une double incapacité :

  • d’une part, une incapacité à contrer le nationalisme de pacotille que développe depuis des décennies le mouvement flamingant, auquel répond le prurit francophone qui veut faire croire que cet esprit borné est celui de tous « les Flamands »,
  • et d’autre part, une incapacité structurelle à se mettre au service du bien commun plutôt qu’à celui de son propre développement.

Pour les simples Belges un tant soit peu attachés à leur pays et à son histoire, le premier point reste une énigme. Comment est-il possible de vouloir déchirer un pays, d’y perdre tant d’énergie et d’argent depuis tant d’années, au nom d’un nationalisme aussi mensonger que le flamingantisme ?

La Flandre d’aujourd’hui n’a, en effet, jamais été la Flandre. La Flandre d’aujourd’hui oublie la moitié de son territoire en France et annexe dans le même élan des provinces qui n’ont jamais été siennes dans l’histoire (Brabant, Anvers, Limbourg) et elle a en sus l’outrecuidance imbécile d’éradiquer sa propre langue patricienne, le français,  qui a servi de support à toute sa culture jusqu’au 20ème siècle. Elle se choisit en outre une capitale qui ne veut pas entendre parler d’elle et qui, par ailleurs, revendique aussi son autonomie. Elle prétend vouloir la fin de la Belgique alors qu’elle sait cette rupture impossible tant du point de vue économique que social et politique.

Curieusement tout le monde sait ceci.

Les milieux les plus « modernes » de Flandre comme ceux des arts, du cinéma, de la musique ou de la mode, tout comme les conservateurs qui n’osent plus affirmer leur attachement premier à la Belgique, tous ces néerlandophones détestent ce nationalisme borné. Mais la pression du mouvement flamingant est telle qu’aucun politique, ni aucun journaliste ni  même aucun politologue patenté n’osent encore ne fût-ce qu’une allusion à ces vérités. Les slogans ignobles et haineux comme « België barst » ou « franse ratten… », non seulement restent impunis mais tétanisent apparemment tous les esprits.

Pauvre Flandre, vers quel régime te diriges-tu !

Par ailleurs, nos politiques d’aujourd’hui semblent souffrir d’une incapacité à prendre la hauteur suffisante pour agir pour le bien commun. Prenons le dernier exemple de cette incapacité dans leur tout récent projet d’accord et le sort qu’ils y réservent au Sénat. Les Sénateurs ne seront plus élus par les citoyens mais cooptés par la particratie.

Si leur souci était vraiment le bien commun et que l’utilité du Sénat était reconnue, nous ne voyons pas pourquoi il ne pourrait plus être élu au suffrage universel ; si par contre c’était son inutilité qui soudain était avérée, il fallait proposer sa suppression. Au lieu de quoi on envisage un Sénat dont les compétences sont à peine esquissées mais où siègeront ceux que les partis désigneront. Bref on crée un club des méritants de la particratie, une maison dorée, de tout repos, pour particrates prépensus. Au passage on en profite aussi pour y éliminer les héritiers du trône ; c’est toujours ça d’enlevé à la monarchie. Bref, on voit tout de suite l’intérêt des partis, mais absolument pas ce qu’y gagne le bien commun.

Exercez-vous, si vous le voulez, à examiner l’évolution de tous leurs accords sous cet angle et vous aurez une meilleure idée de la manière dont ces gens entendent gérer notre bien être.

Il nous semble pourtant que cette crise politique à rallonge était l’occasion rêvée de corriger les erreurs de nos évolutions institutionnelles. L’occasion de proposer une véritable réforme moderne et audacieuse basée sur le principe de subsidiarité en laissant vraiment au pouvoir le plus proche du citoyen la responsabilité entière de tout ce qu’il est en mesure de gérer avant de céder quoi que ce soit au niveau supérieur ; chaque niveau recevant la responsabilité budgétaire et le pouvoir fiscal qu’exigent ses propres compétences

Après avoir vérifié l’utilité réelle pour le citoyen des différents niveaux de pouvoir, nous aurions aussi proposé de faire correspondre chaque circonscription électorale aux électeurs du niveau concerné. Les citoyens de la commune élisent le conseil communal, éventuellement ceux de la province le conseil provincial, ou ceux de la région le conseil régional et ceux du pays le parlement national, enfin, si possible, ceux d’Europe le parlement européen.

La hiérarchie des normes s’impose bien entendu à cette pyramide logique.

Nous aurions, au passage, mis fin au vote de listes dressées par les présidents de partis et leur système dévolutif qui leur permet de  désigner  leurs élus.

Afin de régler définitivement  toutes nos querelles « communautaires », nous aurions enfin interdit, conformément aux droits de l’Homme, toute discrimination entre Belges basée sur le critère de la langue, et nous aurions laissé très démocratiquement aux communes le pouvoir de choisir les langues nationales à utiliser sur leur territoire par les services publics.

Les particuliers et les entreprises gardent, bien entendu, toute liberté sur ce sujet, et les tribunaux seraient également organisés pour que chacun puisse y être jugé dans une des langues nationales qu’il pratique.

Puis nous aurions organisé un referendum national pour ratifier une fois pour toute ces réformes du bon sens.

Au lieu de ce rêve, nous allons nous retrouver une fois de plus avec un « accord » partiel et bancal qui déjà attend les nouveaux assauts du flamingantisme auxquels on prévoit déjà de céder dans un avenir non défini mais présenté comme inéluctable. C’est en cela que ces « accords » n’en sont pas, ils trompent une fois de plus les citoyens belges.

Nous sommes profondément lassés pour ne pas dire dégoutés par cette vision de notre pays comme celui d’un affrontement politique perpétuel. Nous voulons remettre ces sous nationalismes dispendieux à leur place de cornichoneries malsaines et dire tout haut qu’il n’y a pas les Flamands contre les Wallons par-dessus la tête des Bruxellois, mais qu’il y a les Belges qui ont la chance de vivre au centre de l’Europe et donc au cœur même du monde (où le boulot ne manque vraiment pas).

Nous sommes persuadés, surtout, que si ce discours leur parvenait et était repris par les médias de manière normale et objective, il rassemblerait très vite une large majorité des belges toutes langues confondues.

(vote)
Loading...Loading...